Dans un petit village anglais, Jennifer, 14 ans, croise un chien noir qui lui fait froid dans le dos. James, son frère jumeau, n’a pas vu l’animal. Le lendemain, Jennifer meurt. L’événement hante l’esprit du jeune survivant, qui va se mettre à se documenter sur ce mystérieux chien : il serait déjà apparu plusieurs fois, annonçant à chaque fois le décès de la personne qui le voit. Et ce n’est pas la seule légende de la région…

Entre enquête surnaturelle et apprentissage du deuil, cette longue bande dessinée impressionne par son écriture soignée, son scénario bien construit et son graphisme léché. En effet, Norm Konyu, venu de l’animation, démontre un vrai savoir-faire quand il s’agit de raconter une histoire, de distiller des petits morceaux d’intrigue à grignoter tranquillement en attendant le suivant, et surtout de mettre ça en page de manière fluide. Son usage de cadrages variés et de couleurs en transparence donne à l’ensemble une identité forte, qui pourra cliver mais qui résulte d’une réflexion aboutie.

Toutefois, le revers de la médaille de cette (trop) grande maîtrise narrative et visuelle est une vraie froideur qui émane de ces pages. Outre la quasi impassibilité des visages des personnages, tracés comme des masques minimalistes, l’émotion paraît bien factice dans ce récit où le héros cherche à percer le secret de la mort et, en pistant sa soeur, mettra au jour de sordides faits divers du voisinage. On se laisse porter au fil des chapitres, mais sans être ni vraiment surpris, ni jamais bouleversé. Trop propre, trop lisse, trop évident : c’est difficile de reprocher un travail bien fait, mais quand elle ne laisse guère d’aspérités ou de failles ou d’explosion de sentiments, une bande dessinée, aussi élégante et sincère soit-elle, finit par lasser un brin.