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Etienne Davodeau croise vin et bande dessinée

14 novembre 2011 |

davodeau_ignorants_introAvec Les Ignorants, il signe une superbe initiation croisée : celle d’un vigneron, Richard Leroy, à la bande dessinée, et la sienne propre au vin. Formidable conteur de cheminements intellectuels et sensoriels, Etienne Davodeau raconte la genèse et le déroulement de cette aventure, qui l’a vu tailler la vigne, déguster de nombreux vins et ausculter des tonneaux. Mais aussi emmener un artisan viticole chez son éditeur, son imprimeur, ou dans l’atelier de ses collègues.

ignorants03Qui est Richard Leroy ?
C’est un ami et un voisin, nous vivons dans le même village. En discutant avec lui du monde du vin et de sa pratique, je me suis rendu compte que souvent, quand il s’agissait de l’éthique et de la création, je pouvais remplacer le terme «vin» par «bande dessinée».

D’où est née l’idée de croiser vos initiations respectives ?
Depuis plusieurs années, j’avais envie de faire quelque chose avec lui. Mais quoi… ? Je n’arrivais pas à trouver, je calais. Je ne voulais pas faire un Rural bis, avec des vignerons à la place des paysans. Un jour, Richard est venu dans mon atelier, et m’a demandé si mon éditeur m’indiquait quelles couleurs utiliser. J’ai compris qu’il était vierge en BD, et il m’a semblé intéressant de l’y initier. Ce fut comme un flash !

ignorants04Le concept a-t-il immédiatement été validé par votre maison d’édition, Futuropolis ?
J’ai précisé dès le début à mon éditeur, Claude Gendrot, que si je faisais ce livre, il serait improvisé. Je voulais cueillir ce qui se ferait devant moi, vendanger ce que la vie me donnerait. Le principe de base était flou, mais il s’agissait de se lancer dans une confrontation et de la raconter, tout simplement. Claude m’a assuré que c’était une super idée. Dès lors, j’étais coincé, il fallait que je m’y mette ! J’ai demandé à Richard de réfléchir : était-il prêt à passer un an et demi avec moi sur son dos, dans ses vignes ? Ce n’était pas juste une petite balade sympa dans un autre univers, car il n’était pas question d’arrêter le projet en cours de route. Et il fallait qu’il s’engage à me faire goûter de nombreux vins, et à lire beaucoup d’albums. Il a accepté tout de suite.

Qu’avez-vous appris sur le métier de vigneron ?
J’ai eu confirmation que c’était physiquement très éprouvant et que, pour recourir au minimum à la chimie, il fallait être extrêmement précis. Un géologue, venu avec un importateur anglais pour voir le caillou du domaine, m’a affirmé qu’un vigneron devait maîtriser des compétences de biologiste, de météorologue, de chimiste et de cuisinier !

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ignorants05Vous avez découvert la biodynamie [un système de production agricole qui considère un domaine comme un organisme vivant, que l’on peut stimuler de manière naturelle].
C’était un sujet fort intrigant : je suis plutôt cartésien, je me méfie des astres, et je me suis retrouvé à pratiquer cette méthode pour le moins folklorique et ésotérique. Mais comme Richard est très rigoureux et plutôt concret, je me suis dit qu’il avait une bonne raison d’agir ainsi. Traiter la vigne de cette manière a été mon activité préférée. Et cela, même s’il a fallu se lever à 4h du matin et marcher pendant des heures avec une bonbonne en cuivre de 30 kg sur le dos. Voir le soleil se lever au ras des vignes fut un très beau moment.

Qu’avez-vous appris ?
Que je resterai un ignorant concernant la dégustation de vins : c’est le travail de toute une vie ! Je pourrai probablement devenir un ouvrier viticole potable, je peux comparer des vins, construire un choix, mais je n’ai pas la mémoire suffisante pour remonter dans le temps. Si on laisse passer une heure entre deux vins, mes papilles sont perdues ! Par contre, je peux voir la case d’une BD lue il y a dix ans et en retrouver l’auteur…

Quels points communs entre le vin et la bande dessinée ?
J’ai eu l’intuition qu’il en existait dès le début de l’aventure, quand nous sommes allés chez Jean-Pierre Gibrat. Au bout de quelques minutes seulement, lui et Richard parlaient de leurs pratiques comme de vieux copains. Cela s’est confirmé quand nous avons enchaîné une visite chez l’imprimeur et chez le tonnelier : la démarche est la même, une fois le bébé conçu, nous le laissons à quelqu’un d’autre. Nos milieux professionnels se ressemblent : il y est plus simple et rémunérateur de rouler sur de grandes autoroutes, de surfer sur les goûts du grand public. Richard et moi préférons les gens qui prennent de petits chemins rocailleux, des vignerons qui sont accrochés à leurs vignes et ne veulent pas devenir des stars, et des auteurs comme Marc-Antoine Mathieu, qui tracent leur sillon.

ignorants02Comment avez-vous réalisé l’album, concrètement ?
Au bout de deux mois, je me suis demandé si je n’avais pas eu une fausse bonne idée : j’étais trop occupé par mon travail dans la vigne. Non seulement je taillais, mais en plus je surveillais l’impression du tome 2 de Lulu femme nue. Je n’avais pas le temps de prendre de notes ! J’ai réalisé à quel point il était difficile d’être à la fois sujet et auteur d’un livre… Mais j’ai tendu le dos, et cela a pris forme chez le tonnelier : j’étais tranquille alors, je n’avais rien d’autre à faire qu’écrire, prendre des photos et dessiner. Ensuite, je fonctionnais en accumulant mon matériau pendant la journée. Je sélectionnais après les scènes à garder, je les synthétisais, puis les installais dans les pages. J’ai opté pour le noir et blanc pour des raisons pratiques : j’avais besoin de fluidité, et la couleur m’aurait ajouté huit mois de travail. Et puis j’aime le lavis, il permet d’arrondir et approfondir le dessin.

Richard Leroy a-t-il eu un droit de regard sur vos planches ?
Il lisait au fur et à mesure. Il a assez vite réalisé qu’il était simple de lancer un avis très tranché devant un copain, et beaucoup moins de le lire imprimé. Régulièrement, il s’exclamait : « Mais je n’ai pas dit ça ! » Je lui ai donc permis de valider ou non ses propres mots, mais pas les miens ni les textes off.

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Quels sont vos projets ?
Je prépare un album dans la collection coéditée par Futuropolis et le Louvre. J’ai commencé à visiter le musée, j’attends ma carte pour y avoir accès jour et nuit.

Où en est l’adaptation de Lulu femme nue au cinéma par Solveig Anspach ?
Je découvre le monde merveilleux du cinéma, où il faut beaucoup d’argent, et où tout prend beaucoup plus de temps que prévu… J’ai lu trois versions du scénario, le film est en pré-production. Mais rien ne permet d’être sûr qu’il se fera.

Propos recueillis par Laurence Le Saux

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Les Ignorants
Par Etienne Davodeau.
Futuropolis, 24,50€, le 6 octobre 2011.

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Images © Futuropolis.

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Commentaires

  1. Je suis rentré dedans pas à pas okokok Pas mal mais un peu  »lent »
    Puis j’ai adoré et lu d’une traite, jusque tard dans la nuit . Un bon cru qui sait se laisser désirer ^^
    Merci pour l’interview

  2. Je suis rentré dedans pas à pas okokok Pas mal mais un peu  »lent »
    Puis j’ai adoré et lu d’une traite, jusque tard dans la nuit . Un bon cru qui sait se laisser désirer ^^
    Merci pour l’interview

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