Vêtue d’une superbe combinaison noir à imprimé squelette, une jeune femme aux cheveux roses et taches de rousseur pénètre dans la salle de bains de Catalina. Alors que cette dernière vient de se trancher les veines. Karmen va alors inviter l’âme de la fraîche suicidée à profiter de son temps avant de mourir totalement et se réincarner : pour voler, regarder les autres vivre, comprendre la beauté de l’amitié, la fragilité de l’amour, l’enthousiasme de l’engagement. Karmen pourra-t-elle réécrire le destin et sauver Catalina d’une mort certaine ?

Autour d’une intrigue et d’une thématique un peu fleur bleue – elle aime son meilleur ami sans se l’avouer, et lui aussi, et se suicide suite à une crise d’angoisse et de jalousie –, l’Espagnol Guillem March brode un canevas chatoyant sur le karma et la vie après la mort. Il imagine une administration exubérante et sans coeur, dont les agentes sont chargées de récupérer les âmes pour les transférer ailleurs, sans un regard sur le passé des trépassés. Toutes les agentes, sauf Karmen, empathique et atypique, qui cherche l’éclaircie dans le parcours des condamnés, pour améliorer en dernière minute leur score de karma. Pour ce faire, le dessinateur de Monika fait naviguer Catalina dans les airs et les rues de Palma de Majorque, au sein de planches d’une virtuosité ébouriffante, tant dans la ligne charnelle et réaliste que dans le découpage audacieux et les cadrages dynamiques. Si le scénario se traîne un poil au milieu, et qu’on secouerait bien Catalina pour qu’elle comprenne un peu mieux ce qui lui arrive, on se laisse envoûter par cette esthétique bluffante et un personnage-titre attachant. Une bonne surprise, grand public et romantique, dans un genre pas si évident.