On ne parle pas de ces choses-là
On ne parle pas de ces choses-là, non, on ne parle pas de l’inceste, tabou des tabous de notre société. Ou alors si peu. Les chiffres sont pourtant affolants : 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles chaque année en France et 10 % de la population française aurait subi l’inceste. C’est loin d’être anodin ou ne représenter qu’une frange de la population… et pourtant, le sujet n’en est pas un dans la société, et les criminels courent au sein des familles sans être réellement inquiétés.
Cet ouvrage de Marine Courtade et Alexandra Petit est construit comme une enquête familiale. Marine, victime d’inceste par son grand-père, va à la rencontre des membres de sa famille pour aborder le sujet qui n’avait jusque-là était que soupçons, non-dits et autres aveuglements. Journaliste de formation, elle part sur le terrain complexe de la mémoire traumatique et de la mécanique du silence qui entourent l’inceste. Elle tente alors de comprendre pourquoi personne n’a rien dit.
À la croisée entre le récit intimiste et le récit d’investigation, cette bande dessinée approche le sujet d’une manière particulièrement frontale, là où beaucoup de récits préfère y aller de leur métaphore ou de leurs sous-entendus. Ici, pas de doute, il y a eu inceste, le coupable et la victime sont connus, et ce sont les témoins présumés qui sont au cœur du récit. Cette approche inédite de la question montre toute la complexité multipersonnelle, familiale et sociale de ce mal qui est souvent coincé entre déni, peur et culpabilité.
L’ouvrage se termine par un mini dossier éclairant avec données et entretien qui font froid dans le dos. On ne parle pas de ces choses-là, mais heureusement quelques œuvres fortes parviennent à traiter de ce sujet sous différents angles et avec divers points de vue . Car désinvisibiliser est la première étape indispensable à la reconnaissance et le combat contre ce fléau.






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