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Benoît Mouchart et François Rivière racontent un Hergé intime

9 novembre 2011 |

Alors que Les Aventures de Tintin : Le Secret de la licorne a envahi les écrans, Benoît Mouchart, le directeur artistique du Festival d’Angoulême, et François Rivière, scénariste et romancier, creusent la personnalité d’Hergé.

herge_couvDans Hergé, un portrait intime du père de Tintin, ils racontent de façon chronologique un homme complexe, pas toujours admirable, parfois perdu. Sans livrer de révélations fracassantes, ils mettent en lumière certains éléments personnels éclairants. Comme le chagrin d’amour de Georges Rémi en 1925, lorsque sa douce Marie-Louise Van Cutsem, dite Milou (!), doit s’éloigner de lui, forcée par des parents qui estiment sa future carrière de dessinateur peu intéressante. « Dès cet instant, son parcours sera marqué par un profond désir de revanche sociale« , notent les auteurs.

La relation entre l’artiste et Germaine Kieckens, sa première épouse, est aussi détaillée. Complexé, Georges voit en Germaine « un modèle de morale et de pureté supérieures ». En 1932, peu de temps avant leur mariage, il lui écrit dans une lettre : « Je t’aime comme un fils, un petit garçon qui aimerait sa maman qui est si tendre, si bonne, si dévouée, une maman comme on n’en voit pas beaucoup. Une maman qui forme son fils à devenir un homme. » Seulement, Germaine « considère cette union encouragée avec insistance par l’Abbé Wallez [le directeur du Petit Vingtième et mentor d’Hergé, qui ponctionnera abusivement ses droits d’auteur] comme un mariage de raison plutôt qu’un mariage d’amour ». Les illusions d’Hergé tomberont ensuite : « Il est difficile pour un ménage, jeune, sans enfants et très isolé, de vivre replié sur lui-même tout en gardant l’équilibre », écrira-t-il au père Edouard Neut. Outre une immaturité affective, c’est une farouche crainte de la folie qui habite le créateur de Tintin. Le thème hante ses albums, prenant racine dans la « dérive mentale » de sa propre mère.

Le livre aborde aussi les idées politiques d’Hergé. Sous l’occupation allemande, il est au chômage pour la première fois de sa vie. S’il refuse de créer un supplément au quotidien Le Pays réel de Léon Degrelle (le chef du mouvement rexiste, avec lequel il s’est brouillé), il accepte de s’occuper du Soir Jeunesse – alors que Le Soir a été mis sous séquestre par les Allemands -, sur la proposition de Raymond De Becker, un homme aux sympathies nationales-socialistes affirmées. Critiqué pour cela, Hergé répond ainsi par écrit à son ami Philippe Gérard, qui lui reproche de s’être « rangé du côté de ceux qui font, sous le couvert de révolution et d’ordre, une sale besogne » : « Je ne suis ni germanophile ni anglophile. J’avoue cependant que la notion d’ « ordre nouveau » me plaît. S’il était vraiment ce qu’on nous promet qu’il sera, je m’en réjouirais. Mais on peut supposer aussi que l’Allemagne ne cherche qu’à nous leurrer, et qu’elle nous considérerait comme des esclaves, si son hégémonie sur le continent lui restait acquise. Eh bien, même si l’Allemagne choisissait l’esclavage, j’aurais au moins la conscience tranquille, et je pourrais me rendre à cette justice – à supposer que mon opinion ait quelque importance – que je n’aurais rien fait pour empêcher cette collaboration de se réaliser. »

Usant d’un ton plutôt neutre, jamais complaisant ni gratuitement à charge, Benoît Mouchart et François Rivière décryptent de façon passionnante l’existence d’un homme parfois obtus, colérique et carrément odieux (« Evidemment, j’aime bien voir les « belles madames » mais pourquoi éprouvent-elles donc le besoin de parler ? », est-il capable de lâcher à un journaliste), souvent touchant et génial, et régulièrement en plein doute – « Il  a divorce complet entre ce que je pense et ce que j’invente et dessine », écrit-il à Germaine en 1947. Un parcours inégal, foisonnant, qui donna naissance à une grande série de bandes dessinées.

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Hergé, un portrait intime du père de Tintin
Par Benoît Mouchart et François Rivière.
Robert Laffont, 19€, le 17 octobre 2011.

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Commentaires

  1. François Pincemi

    Merci pour la citation:« Il a divorce complet entre ce que je pense et ce que j’invente et dessine », mais vous auriez pu la replacer dans son contexte précis: celui de l’aprés-guerre, qui lit un terme définitif à son enthousiasme de créateur et renforça le divorce entre Tintin et son créateur

  2. François Pincemi

    Merci pour la citation:« Il a divorce complet entre ce que je pense et ce que j’invente et dessine », mais vous auriez pu la replacer dans son contexte précis: celui de l’aprés-guerre, qui lit un terme définitif à son enthousiasme de créateur et renforça le divorce entre Tintin et son créateur

  3. luxsword

    En ce qui me concerne, j’en resterai aux albums. PLus on rentre dans la vie des « génies » et autres « grands hommes  » plus on est déçus, soit parce qu’ils sont juste banals, soit parce qu’ils ne sont pas si respectables/admirables que ça…

  4. luxsword

    En ce qui me concerne, j’en resterai aux albums. PLus on rentre dans la vie des « génies » et autres « grands hommes  » plus on est déçus, soit parce qu’ils sont juste banals, soit parce qu’ils ne sont pas si respectables/admirables que ça…

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