Au cœur des montagnes pas loin d’un barrage, un étrange accident de voiture tue sur le coup un homme et sa maîtresse. Tellement étrange qu’il ne s’agit peut-être pas d’un hasard. Le garagiste du coin, mari de la victime et bouc-émissaire idéal, va alors croupir un bout de temps en prison. Des années plus tard, le détective Jérôme K. est missionné par un notaire pour remettre une lettre à un mystérieux « ermite »…

Trente ans et une vingtaine de tomes plus tard, les aventures de Jérôme K. Jérôme Bloche, détective futé et lunaire, continuent d’enchanter. Et pourtant, le procédé narratif choisi dans ce tome laissait craindre, par son systématisme et ce dès les premières pages, une rapide lassitude. Il n’en est rien car le flashback qui remonte le fil d’une enfance traumatisante et l’enquête au présent de Jérôme K. se mêlent dans un jeu de dévoilement assez prenant.

Mais là n’est sans doute pas l’essentiel, qui est plutôt à chercher dans la peinture d’une humanité immédiatement touchante. À la faveur d’une galerie de personnages toujours attachante (Babette et ses escarpins en montagne, Jérôme et sa phobie de l’avion, l’ermite trahi…) les liens se dénouent, les mobiles s’éclaircissent et l’intrigue dévoile sa petite complexité sans trop en faire, oscillant entre humour léger et inévitable tragédie familiale. Côté dessin, on appréciera sans ciller la ligne claire naturaliste au charme délicieusement suranné, magnifique d’observation, variant les tons et les teintes en fonction des ambiances à décliner. Bref, malgré le drame, c’est bien la touchante sincérité des personnages et  l’émouvante sobriété du récit qui font de Jérôme K. Jérôme Bloche une grande série.