Coquelicots d’Irak
Brigitte Findakly est née et a passé son enfance à Mossoul, en Irak, dans les années 1960. Le pays natal de son père, dentiste. Un pays dans lequel sa mère s’est bien intégrée, malgré quelques petites coutumes auxquelles il fut difficile de se plier. Mais ce sera la situation politique perpétuellement instable qui scellera l’avenir de la famille – jusqu’à l’arrivée d’un dictateur charismatique, Saddam Hussein –, contrainte de s’exiler en France. Ce sont ses souvenirs de petite fille, et les récits de sa mère, que la coloriste raconte ici, mis en images par son dessinateur de mari, Lewis Trondheim.
Diffusés sous forme de strips dans l’application La Matinale du Monde, ces Coquelicots d’Irak gagnent grandement à être lus en album, publié par L’Association. Car l’enchaînement de ces petites saynètes, tour à tour cocasses et terribles, fonctionne parfaitement, oscillant entre la description faussement naïve de la vie d’une petite fille d’origine occidentale dans un pays pauvre et des pages plus historiques rappelant le contexte. Pour le thème et l’époque, on pense parfois à L’Arabe du futur, dans lequel Riad Sattouf raconte son enfance en Libye puis en Syrie, mais aussi aux livres de Guy Delisle (Chroniques de Jérusalem) pour la mise à distance entre les petites choses du quotidien et le portrait politique – et drôle – d’une région instable et brutale. Le ton est doux, parfois nostalgique, et se fait bouleversant dans les dernières pages, dans lesquelles Brigitte Findakly évoque le grand âge de son père, Irakien déraciné, en même temps que l’implosion d’un pays en guerre. Le dessin tout en retenue et sobriété de Trondheim, comme un petit théâtre de marionnettes enfantines, renforce idéalement le propos, collant à l’évocation de l’enfance et contrastant de manière frappante avec la violence de certains passages. Une belle réussite.
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