Black Gospel
En 1983, quelques jours avant le vingtième anniversaire du grand discours de Martin Luther King, celui qui le vit prononcer à Washington les mots « I have a dream », le meurtre sanglant de deux jeunes avocates agite la police de New York. Car le lien est fait avec un assassinat aux circonstances similaires, justement 20 ans plus tôt. Il ne faudrait pas que les hommages au pasteur King soient perturbés… Un inspecteur new-yorkais, abrupt et raciste, se rend donc à Washington pour tenter de faire la lumière sur cette étrange coïncidence. Qui n’en est évidemment pas une…
Dans une atmosphère poisseuse, où la violence – physique, verbale, mentale – se retrouve à tous les niveaux de la société américaine, Laurent-Frédéric Bollée (Les Illuminés, Deadline, La Bombe…) propose un polar sombre et complexe, un peu à la James Ellroy. Mêlant différentes trajectoires et désirs de personnages, jamais totalement innocents, il compose une enquête très noire et peu porteuse d’espoir dans l’âme humaine. Par moments, dans les séquences purement policières notamment, le parti pris fonctionne. À d’autres, beaucoup moins. Car son intrigue semble trop alambiquée, et les motivations des protagonistes pas assez crédibles. Le coup de foudre du raciste Kovalski pour une jolie black est un peu gros, la quête meurtrière d’un curé ghanéen ne convainc guère non plus. Et les liens avec Martin Luther King, la culture afro-américaine et la lutte pour les droits sociaux trop éloignés. Côté dessin, le ressenti est le même. Certaines planches de Boris Beuzelin sont bluffantes de sobriété, dans un noir et blanc tout en contrastes et expressivité. D’autres en revanche paraissent plus fragiles, notamment dans les visages des personnages et un semi-réalisme qui verse trop dans le caricatural. On referme donc ce Black Gospel avec un sentiment mitigé, entre le bon goût du polar sans concession et une saveur amère d’un album qui est passé à côté de quelque chose…






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