Image Image Image Image Image Image Image Image Image Image

BoDoï, explorateur de bandes dessinées – Infos BD, comics, mangas | April 27, 2024















Retour en haut de page

Haut de page

No Comments

Les + du blog : MEMOIRES DE JACQUES SADOUL 2/7

26 mai 2006 |

Manara.jpg

Après le succès, en 1968, de L’enfer des bulles, chez Pauvert, Jacques Sadoul remet ça en 1990 avec L’enfer des bulles 2, chez Albin Michel (ci-dessus la quatrième de couverture signée Manara).

«JE LANCE LE MOT “BULLES”, IL EST REPRIS

PAR GAINSBOURG ET PLÉBISCITÉ»

Il faut savoir être modeste, toute mon « œuvre littéraire » aura consisté à avoir donné un mot à la langue française. Non, mêmeSadoul.jpg pas un mot : une nouvelle acception d’un mot, mais elle est si bien ancrée dans le langage qu’elle me survivra. Jusqu’au mois de juin 1968, les personnages de bande dessinée s’exprimaient dans des ballons, ou, pour les puristes, dans des phylactères. Le mot « ballon » venait de balloon utilisé outre-Atlantique car il ne faut pas oublier que les petits Mickeys nous viennent d’Amérique. Aujourd’hui encore les plus anciens auteurs de BD en France parlent de « remplir les ballons ».

En juin 1968, je publiai L’Enfer des bulles aux éditions Jean Jacques Pauvert, un gros album consacré à l’érotisme dans la bande dessinée. À l’époque la censure ne plaisantait pas avec tout ce qui touchait de près ou de loin au sexe, tante Yvonne (l’épouse de De Gaulle) y veillait, il fallait ruser avec elle (le mot « elle » s’applique indifféremment à la censure ou à tante Yvonne). La Bibliothèque Nationale garde ses ouvrages érotiques ou licencieux dans une partie surnommée « l’enfer », d’où le choix de ce mot comme titre de mon ouvrage.

Mais L’Enfer des ballons était ridicule et L’Enfer des phylactères pire encore. Pauvert et moi avons envisagé L’Enfer des fumées car les Italiens nomment leurs BD des fumetti, au moins le feu et la fumée avaient un rapport, mais le titre n’évoquait en rien la bande dessinée. C’est alors que Jean Jacques, désignant un ballon, me dit : « Ça évoque aussi une bulle ». Je réfléchis et lui répondis : «Personne n’appelle ça une bulle, mais L’Enfer des bulles, c’est intrigant. Alors, pourquoi pas ? »La fortune du mot fut immédiate car l’album amusa de nombreux journalistes. Ils n’étaient pas spécialistes de BD et ils s’imaginèrent que « bulle » était d’usage courant. Quelque temps plus tard, Serge Gainsbourg le reprit dans une chanson, Ip-Shebam-Pow-Blop-Wm (orthographe non garantie). Il était toujours à l’affût d’expressions nouvelles et branchées. Bien sûr, lors de la parution de l’album, des dessinateurs et scénaristes amis, Forest, Druillet, Gotlib, Mœbius, etc., me demandèrent tout d’abord si j’avais perdu la tête, puis ils admirent mes explications.Peut-être devrais-je entreprendre les visites académiques rituelles et demander un fauteuil à l’Académie française pour avoir fourni un mot à son dictionnaire. Après tout, on y élit bien des généraux qui n’ont même pas écrit une ligne de l’Histoire de France.

SUITE : « Pour lancer la collection BD de J’ai Lu, je vais voir Gotlib… »

Texte tiré de C’est dans la poche ! de Jacques Sadoul, éditions Bragelonne, 200 pages, 17 euros. © Bragelonne 2006

Lire les autres dossiers : 1/7, 3/7, 4/7, 5/7, 6/7, 7/7

Publiez un commentaire