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Le retour tonitruant de Tank Girl : rencontre avec Alan Martin

15 février 2010 |

tank_girl_introCréée à la fin des années 80 par un trio de jeunes auteurs fans de rock et de cinéma bis, la série Tank Girl est rapidement devenue culte. En 1996, elle fait une rapide apparition en France chez Vents d’Ouest – au moment de la sortie de sa désastreuse adaptation ciné -, puis se fait invisible dans l’Hexagone. Heureusement, dans le sillage du Britannique Titan Books (qui entreprend de rééditer les premiers épisodes), Ankama se charge de publier la version française de cette bande dessinée nourrie au punk, à la bière et au napalm, qui n’a pas pris une ride. Rencontre à Angoulême avec Alan Martin, le scénariste de cette tuerie graphique, pour tenter de comprendre pourquoi Tank Girl est toujours aussi percutante.

tank_girl_atomtanQuand je rencontre Alan Martin dans le petit box privatif du stand Ankama à Angoulême, je sais que je n’ai que 30 minutes à passer avec lui, alors je zappe les questions les plus courantes, concernant l’invention du personnage par exemple. Ça tombe bien, puisqu’il y répond dans l’introduction du premier volume de la réédition française. Le personnage de Tank Girl est donc né en Angleterre en 1987 dans un fanzine, Atomtan, créé par Alan Martin, Philip Bond et Jamie Hewlett, alors étudiants en art. Elle n’est pas encore l’héroïne de sa propre histoire, mais juste une drôle de nana avec un bazooka, qui promet sur un poster de nous « casser les pieds et les couilles » (image ci-contre). Il faut attendre un an et demi pour qu’elle commence à vraiment mettre le feu dans le premier numéro du magazine Deadline.

Tank Girl est une mercenaire solitaire, qui vit dans son tank et se met la tête au carré à la bière dès que possible. Elle fréquente un kangourou benêt, des copines aux gros calibres et toute la faune de sauvages, de hors-la-loi et d’allumés plus ou moins mystiques que compte le désert australien. Concernant les inspirations et références qui constituent l’identité de Tank Girl (le tank, la coupe de cheveux, l’Australie…), Alan Martin cite en vrac la saga BD Love & Rockets, les films Mad Max, De l’or pour les braves et Crocodile Dundee, et tout un tsunami de pop culture qui le nourrissait à l’époque, et qu’on retrouve plus ou moins dissimulé dans les cases de la série. Bref, Tank Girl est une ado rebelle perpétuelle, une fille de la génération punk et la grande soeur des geeks et de freaks d’aujourd’hui.

tank_girl_fusilMais on ne l’a plus beaucoup vue depuis le film de Rachel Talalay sorti en 1995, avec Lori Petty et Ice T.. Où était-elle passée ? « Nous avions été trahis par le film et, par dégoût, nous avions laissé Tank Girl pour morte, avoue Alan Martin. Mais en fait, elle n’était que cryogénisée ! Car quand Titan Books a ressorti les premiers épisodes dans leur version d’origine en noir et blanc, nous avons constaté que les ventes étaient bonnes, et que Tank Girl avait encore un public. On a alors tenté de lui faire vivre de nouvelles aventures et, étrangement, c’est venu tout seul. Pour moi, c’était la chose la plus naturelle au monde ! »

Toutefois, la série a changé de dessinateur, les talentueux Rufus Dayglo et Ashley Wood prenant la suite de Jamie Hewlett. Car des choix de vie et de carrière sont également à l’origine de cette mise en sommeil de près de dix ans. Jamie Hewlett participe en effet, aux côtés de Damon Albarn, au groupe Gorillaz et à divers opéras-pop qu’ils montent ensemble. « On connaissait Damon dès le début de Blur! », se souvient Alan Martin qui, lui, a vécu cette petite décennie bien plus discrètement. Au point qu’il n’a même pas de page Wikipédia à son nom… « J’ai joué dans un groupe, j’ai tenu un pub, et j’ai pas mal voyagé. J’ai eu des enfants aussi. »

tank_girl_journeeMais Tank Girl, la rebelle de l’Outback australien, s’est-elle assagie pour autant ? « Peut-être un peu, concède Alan Martin. Son essence rebelle n’a pas disparu, mais elle réfléchit sans doute un peu plus. Elle a grandi, en un sens. » Pourtant, Tank Girl représente le coup de pied dans les conventions dont le monde contemporain aurait bien besoin, selon le scénariste. « Chaque jour apporte son lot d’interdictions, surtout en Grande-Bretagne. C’est le paradoxe du monde d’aujourd’hui. On a beaucoup plus de liberté dans la communication, grâce aux nouvelles technologies. Et en même temps, on est de plus en plus surveillé, et on doit vivre avec toujours plus de restrictions. On est obligé de jongler avec les interdits et cela génère énormément de frustration. »

Alan Martin ne voit pas Tank Girl comme une révolutionnaire ou une alter-mondialiste radicale, mais plutôt comme une « étrangère au système ». « Car les vraies alternatives n’existent plus vraiment. Avant, vous pouviez monter un groupe de rock et jouer pendant dix ans dans de petites salles, constituant peu à peu votre public, avant que l’industrie musicale vous remarque enfin. Aujourd’hui, on vous met le grappin dessus tout de suite, et vous rentrez dans le système… » Mais attention, Alan Martin n’est pas si amer que ça. Il n’est simplement plus le jeune punk bourrant les bulles de ses BD d’insanités plus originales les unes que les autres. C’est un papa heureux et débonnaire, vivant au bord de la mer, près de l’Écosse. Qui n’a pas abandonné ses rêves de grandeur avec Tank Girl, notamment celui d’un retour sur grand écran. « Si Jamie arrivait à caser ce projet dans son emploi du temps, j’adorerais qu’il réalise ce film. Et, dans l’idéal, ce serait un dessin animé, bien sûr ! Mais les droits sont coincés à la MGM. Et comme ce studio est au bord de la faillite, plus personne ne répond au téléphone là-bas. Je me demande s’il y a encore quelqu’un qui y travaille… »

Benjamin Roure

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tank_girl_couvTank Girl #1 et #2.
Par Jamie Hewlett et Alan Martin.
Ankama éditions, 12,90€ le volume, le 11 février 2010.

À paraître, Tank Girl #3 (en mars) et The Cream of Tank Girl (artbook, en juin).

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Images © 2010 Hewlett et Martin.
Original publisher, Titan Books a division of Titan Publishing Group Ltd.
All rights reserved.
Ankama éditions pour l’édition française.

Photo © BoDoï

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