Annie Sullivan et Helen Keller
Fin du XIXe siècle en Alabama, Helen Keller, jeune fille devenue aveugle et sourde à l’âge de dix-neuf mois, est incapable de communiquer. À six ans, ses parents décident d’engager une professeure dédiée, Annie Sullivan, elle-même atteinte de cécité partielle. À force de courage et au prix d’un effort douloureux, Helen va peu à peu progresser, apprendre, parler avec ses mains et s’exprimer. Les deux femmes, unies par la même volonté de se libérer, vont tisser une relation puissante…
Comment représenter l’univers d’une fillette aveugle et sourde ? Le silence, l’obscurité, le vide ? C’est à ce problème que répond Joseph Lambert dans cet album, version BD d’une histoire vraie et célèbre. Alors comment ? Par une prouesse visuelle, véritable ressort narratif d’un livre maîtrisé de bout en bout. Du noir profond aux couleurs effacées, de mots jetés sur les objets à une syntaxe construite en passant par le langage des signes, le graphisme étudié souligne la lente transition d’une prison mentale vers la compréhension d’un monde ouvert, de la défiance à la confiance, en un pénible apprentissage freiné par les habitudes d’un milieu conservateur. Malins, aussi, sont ces allers-retours entre le passé d’Annie à l’Institut Perkins et la progression sensorielle d’Helen. Ils cristallisent la métamorphose quand la partie graphique restitue des perceptions. Les personnages secondaires, profonds et tiraillés, achèvent de poser la dramaturgie.
Outre la performance formelle, Joseph Lambert trouve la parfaite distance avec son sujet : ni dans l’empathie mielleuse, ni dans l’analyse froide, il suggère la force de ce lien unique entre deux personnes isolées, fatiguées mais persévérantes ou passionnées. Encore plus à la fin quand le cas d’Helen, instrumentalisé, devient objet de curiosité médiatique. Et si le sujet n’éveillait a priori aucun intérêt particulier, le résultat, un concentré d’émotion pudique, est simplement bluffant de justesse et d’équilibre. Un biopic poignant.
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