Béril en bataille
Devenir adulte serait, parait-il, dans l’ordre des choses. Pourtant, force est de constater que le manuel manque et que l’instinct ne suit pas. Rester enfant, goûter le présent, prendre le jeu au sérieux et la vie un peu moins, voilà qui semble bien plus naturel. Ce difficile passage à l’âge des responsabilités est d’ailleurs le sujet de nombre de bandes dessinées, tant nous avons encore besoin de ressasser cette drôle d’histoire pour bien être sûrs de ce qui nous est arrivé. C’est encore le cas de Béril en bataille, deuxième bande dessinée d’Adèle Maury après Gratin de chat. Sauf que le talent de la jeune autrice fait une différence de taille avec ses collègues.
Béril est orphelin de mère et son père s’en occupe seul quand son emploi du temps de fermier lui en laisse le temps. Pour le reste, il y a Mireille la chèvre qui peut garder un œil sur lui. Mais surtout, il y a Coltaire le lièvre et Anour la coccinelle, ses deux meilleurs copains avec qui il passe le plus clair de sa journée. Car oui, Béril a ce petit truc : il peut parler aux animaux. Le seul souci, c’est qu’une coccinelle ça vieillit rapidement et un lièvre toujours un peu plus vite qu’un humain. Il voit donc directement, devant les expériences vécues par ses amis, ce qui l’attend. D’ailleurs, pour lui, la voie est déjà toute tracée par son père dont il est censé prendre la suite. Pas sûr, pourtant, que ce soit ce dont il a vraiment envie. Comme par hasard.
D’un sujet somme toute banal, Adèle Maury parvient à faire une BD d’exception. Par son dessin, d’abord, qui réussit le tour de force d’être doux sans être sirupeux et dont les silences poétiques épousent plutôt qu’ils ne submergent une ligne concrète et vivante. Ses choix narratifs, ensuite, viennent chambouler les attendus et donner au récit initiatique de Béril une vérité de tous les instants. En mêlant le fantastique à la ruralité, en ajoutant de la magie à des questionnements des plus communs, la désormais Bruxelloise parvient à enchanter la difficulté d’être grand sans en effacer les peines et les contraintes. Larmes et sourires se conjuguent à tous les temps pour une bande dessinée à la tendresse profonde et aux tiraillements déchirants. Être adulte, c’est relou, mais raconté par Adèle Maury, ça passe largement.






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