Possessions
Il y a quelque chose de pourri dans les rues de Turin. Mais ça, Antonio ne l’avait pas anticipé, d’autant qu’il ne pensait pas y aboutir après son suicide raté, d’un coup de volant désespéré en sortant du tunnel. Le voilà donc convalescent en Italie, loin de son quotidien parisien aliénant, ruminant la douleur de la disparition de son père. Rapidement, contre toutes attentes, il se fait embaucher par un écrivain bizarre et son mécène qui l’est encore plus, afin d’exhumer les secrets sataniques de la ville. Commence alors une plongée dans un monde magique et dangereux, sur lequel Antonio n’a pas de prise…
Entre thriller fantastique, promenade littéraire et ésotérique à Turin, et introspection de quadra, Possessions tente de maintenir sur quelque 400 pages un équilibre complexe. Car à mesure que les pages défilent, l’enquête se fait plus vertigineuse, les fausses pistes se multiplient comme les découvertes sur l’histoire magique de la cité. Hélas, quelque chose ne fonctionne pas dans le récit, qui paraît factice de bout en bout alors même qu’on sent l’auteur très proche de son sujet. Déjà, l’incipit de plus de 60 pages censé dessiner la personnalité torturée du héros est plus poussif que touchant, ne suscitant guère d’empathie pour cet écrivain aigri à grosses lunettes. Ensuite, les événements s’enchaînent avec trop de fluidité et d’évidence, perdant le souffle de mystère initial, à la manière d’un film noir ou d’un giallo. La faute sans doute à une mise en scène trop délayée et trop explicative, dans des pages pas assez denses ni en infos ni en dessins. Une vraie frustration, car l’auteur de Captain Death et Lastman Stories – Soir de match en a sous la pédale, et déploie quelques idées intéressantes dans les séquences oniriques. Mais le choix d’un graphisme épuré, d’une mise en couleurs criarde et d’une intrigue assez linéaire dopée par quelques rebondissements artificiels dilue l’attention et l’intérêt : on aurait aimé suivre le guide Bacci dans le Turin fantastique, mais on l’a trop vite perdu dans des ruelles mal éclairées et dans un projet où sa part d’intime s’est mal glissée dans un récit de genre.





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