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Troublante « Histoire décolorée » d’Amandine Meyer

17 février 2016 |

La couverture est à l’image du livre : des couleurs chatoyantes, un trait délicat à l’épure séduisante, autant d’invitations à entrer dans l’univers affable et intrigant d’Amandine Meyer. Innocent et lisse, en apparence seulement. Car l’artiste met en scène des petits chérubins, représentés par leurs seuls contours, au cœur d’un règne végétal luxuriant, et vivant des scènes étranges.

couvmeyerFilles et garçons observent, se scrutent, se tirent la tignasse, jouent à la ronde ou à cache-cache avec les adultes et finissent par s’enfoncer dans les éléments naturels comme pour épouser un idéal céleste ou échapper à l’enfer terrestre. La naïveté du visuel cédant peu à peu la place au triomphe amer du surnaturel : les bras se muent en cactus, les enfants – les yeux bandés – se mutilent les chairs, se noient dans des océans de larmes ou voient leurs intestins quitter un corps qui enferme. Dans le monde d’Amandine Meyer, un onirisme échevelé précède l’irruption d’un surréalisme retenu pour une belle alchimie des contraires. Les séquences, une dizaine présentées chacune dans des couleurs édulcorées, rythment des explosions de fluides corporels ou des tableaux inquiétants.

Le temps passe, les enfants deviennent adultes et accèdent à la conscience d’un monde qui étouffe, enchaîne. Le repos ne peut être que bref et le silence coupable. Rêve ou cauchemar ? Paradis ou gouffre sans fond ? L’esthétique de cet univers très sensitif oppresse, séduit, apaise et révèle la force d’un univers d’auteur qui rappelle par moment le symbolisme de Ludovic Debeurme. C’est ensuite au lecteur d’y voir ce que bon lui semble.

Mais le troublant Histoire décolorée, en s’abreuvant aux sources de l’enfance pour en tordre la représentation, parle au cœur et à l’esprit sans qu’on sache très bien pourquoi. Où la jungle, à la fois sanctuaire précaire et réceptacle d’angoisses primaires, et la narration, vecteur muet d’un ravissement trouble, emportent avec aisance tout en berçant aux frontières du réel. Le malaise n’est pas loin, la tranquillité de l’âme non plus. Une jolie réussite pour cet objet au sens riche.

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Histoire décolorée.
Par Amandine Meyer.
Misma, 16 €, février 2016.

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meyer

 

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