Bellicus



Il y a bien longtemps, sur notre bonne vieille Terre, les premières tribus humaines vivaient de chasse, de pêche et de cueillette. Surtout pas de petits dessins gravés sur des troncs ou des pierres, comme ceux de Raoul. Une passion qui vaut à ce petit gars tout frêle, railleries et rancoeurs de la part de son clan, et notamment de la fière chasseuse Koska. Mais Raoul s’en moque et envisage de partir découvrir le monde avec la douce Noa… Sauf que, par un malheureux concours de circonstances (et un peu de manipulation d’un clan sanguinaire), Raoul découvre le feu et précipite le massacre des siens. Massacre dont il sera le seul survivant avec Koska, désormais éclopée, et Noa, kidnappée. Pour se venger et sauver Noa, le duo mal assorti Raoul-Koska va prendre la route et croiser celle d’un être venu d’ailleurs…
Attention, point de visée scientifique dans cet album se déroulant pendant la préhistoire. Eldiablo (Carcajou, Semper Feri, Monkey Bizness…) déroule une haletante aventure autour du thème de la violence intrinsèque de l’être humain, à la fois pulsion motrice de ses actes et moyen pour parvenir à ses fins. Chacune des étapes, des épreuves de Raoul et Koska, binôme joliment opposé, se résoudra dans le sang, la coercition, la domination, sous le regard ahuri d’un extraterrestre documentant avec joie les facéties de ces hominidés au début de leur évolution. Pourtant, malgré l’horreur des situations et le gore outrancier de certaines séquences, on rit. Car aux dialogues affutés comme un silex d’Eldiablo répondent les dessins incandescents de Pierre Ferrero (Cauchemar, Isaac Neutron, Marlisou) : dans un style cartoon déviant, tout en élasticité et déformations, et par un travail de couleurs chatoyant et fouillé, le dessinateur construit un univers graphique étonnant et assez fou, qui facilite dès les premières cases l’immersion dans cette préhistoire borderline.
Et le plus fort dans ce projet en apparence foutraque, c’est qu’il porte un évident message politique, franchement sombre et appuyé dans un épilogue en forme de saut dans le futur de la planète, qui résonne d’autant plus aujourd’hui que le mot « guerre » est sur toutes les lèvres : avec les humains, dont la haine et la violence supplantent trop souvent l’empathie et l’amour, la Terre semble inéluctablement condamnée.
Publiez un commentaire