Après avoir ausculté la maladie, la maternité, l’handicap et l’exil – Les Deux Vies de Baudouin, Ce n’est pas toi que j’attendais et  L’Odyssée d’Hakim –, Fabien Toulmé continue d’explorer le champ de l’humain. Avec ULIS, il raconte la reconstruction d’un homme en perte de repères, confronté à un monde qu’il ignorait : celui des AESH et des classes ULIS, ces dispositifs d’inclusion scolaire pour enfants en situation de handicap.

Le héros, Ivan, ancien ingénieur en quête de sens, devient accompagnant d’élèves en situation de handicap. La parenthèse devient alors une aventure humaine totale. L’auteur dépeint avec empathie et pudeur un univers de patience et de débrouille qui rompt avec les grands discours sur l’éducation inclusive, qui laisse souvent ce personnel dévoué dans des situations de précarité. On retrouve ici le trait clair et expressif de Fabien Toulmé : ligne fine, cadrages soignés, couleurs douces, un style faussement naïf qui sert le propos en évitant le pathos.

L’auteur fait naître l’émotion d’un simple regard, d’un silence, d’un détail du quotidien. Avec ULIS, il signe un album intime, où la fiction rejoint le réel avec une acuité documentaire. L’auteur ne cherche pas à héroïser ni à plaindre. Il raconte l’ordinaire de l’inclusion scolaire, ses failles, ses réussites, ses moments de grâce aussi. Peut-être manque-t-il parfois des charges plus violentes contre une situation qui aboutit, cela arrive, à des drames humains, tant du côté des AESH et des enseignants, que du côté des familles. L’auteur, comme souvent, préfère les dénonciations douces. 

À travers Ivan et ses élèves, ULIS met en lumière ces accompagnants souvent oubliés des politiques publiques, sans jamais sombrer dans le manifeste (et c’est peut-être là, la limite de l’album). Avec ses 272 pages, ULIS s’annonce comme une œuvre dense, à la fois chronique sociale et quête personnelle. L’auteur offre ici un hymne discret à l’inclusion et à la résilience, tout en cédant parfois à un tableau un peu trop irénique.