L’Obsolescence programmée de nos sentiments
Ulysse, déménageur, 59 ans, vient d’être mis à la retraite. Solitude et sensation du vide le gagnent peu à peu. Pour seul compagnon, son vieil appartement défraîchi à deux pas du stade Félix-Bollaërt, où les fleurs fanées donnent la réplique à un rameur hors d’usage. Car son fils, médecin, n’a guère de temps à lui consacrer et Ulysse, en outre, ne sait rien faire. Mais le jour où il tombe sur Méditerranée dans la salle d’attente du cabinet de son fils, la vie va prendre un tour inattendu…
Sacré Zidrou (Le Beau Voyage, L’Indivision, L’Adoption, Chevalier Brayard, Natures mortes, Shi, La Petite Souriante…)! Qui empile les scénario comme on visse les rivets. À la chaîne ! Mais voilà, Zidrou est peut-être l’exception qui confirme la règle. Car sa boulimie d’histoires à raconter n’entame en rien leur qualités. Encore une fois, un thème compliqué en BD dans L’Obsolescence programmée de nos sentiments, la vieillesse, des trajectoires heurtées et l’horizon d’une fin de vie, heureusement rattrapée par les sentiments. Car si le récit démarre dans une ambiance mortifère, rencontres et imprévus vont le faire évoluer sur des chemins romantiques surprenants. Sans en faire trop dans le genre larmoyant ou les bons sentiments, Zidrou tisse une romance de « jeunes vieux » assez classique. L’originalité venant de l’âge des figurants (59 et 62 ans) et de cette façon pudique, sincère et touchante d’aborder le dernier acte d’une existence qu’on croit finie la retraite arrivée. Mots justes et humour léger épousent un rythme doux, bien aidé par le dessin inspiré de la dessinatrice AImée de Jongh. Teintes sombres ou pastel, gros plans et cadrages serrés tout en retenue, c’est parfois cru mais tellement bien fait que les corps desséchés redeviennent désirables, les rides pleines de charme… On passera sur les quelques défauts (titre à rallonge, jeu lourd sur les prénoms pensés pour le scénario, dialogues incohérents) pour ne retenir que l’audace et la maîtrise du duo d’auteurs, qui n’invente rien mais séduit par son intelligence narrative. Un joli moment.
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