Belle surprise que l’exposition « carte blanche » de cette édition 2025 du festival BDFIL de Lausanne. C’est à Dora Formica, illustratrice qui vient de publier sa première bande dessinée chez Helvetiq, intitulée Certifié humain, qu’a été confié un espace à investir comme bon lui semble. Elle y présente une poursuite de sa réflexion, entamée avec sa BD, sur l’intelligence artificielle générative.

Dans la première salle, Dora Formica rend hommage à son père, l’illustrateur Marc Taraskoff (décédé en 2015), qui réalisé des dizaines des couvertures de livres (dont celles des Chroniques de San Francisco, en 10/18) et des centaines de dessins pour la presse (des portraits pour Le Monde, notamment). De son temps, impossible de demander à une IA de pondre un visuel de couverture de livre. On faisait les illustrations des livres à la main, et on portait le dessin ou la peinture directement chez l’éditeur : pas de télétravail, l’artiste vivait là où il pouvait vendre ses oeuvres, c’est-à-dire à Paris, loin de sa fille restée à Lausanne. Un outil de communication privilégié entre eux deux : un fax, pour s’envoyer des dessins…

Dans la seconde salle, Dora Formica a réinstallé son atelier, comme pour bien signifier que l’humain, avec ses pastels, son taille-crayon, ses Post-it, continue de créer, sans remâcher le travail des autres. Dans la dernière pièce, l’autrice montre le résultat d’un voyage à travers l’Europe, à la rencontre d’artistes qu’elle a interrogé sur le sujet de l’IA (entretiens audio avec Camille Jourdy, Guillaume Long, Léonie Bischoff, Anne Wilsdorf… à écouter ici). Dora Formica dessine leur atelier, leurs bibelots, leur petit monde de création, et même montre certains de leurs objets (dont le traceur à dédicaces de Martin Panchaud !). Et a demandé à des amies architectes de recréer en maquette ces ateliers : une idée brillante au rendu magique.

Une manière intelligente de prolonger son oeuvre et sa réflexion de l’humain – son geste, sa trace, son souffle – face à des machines de plus en plus perfectionnées…

Photos © BoDoï