Jean Atwood a toutes les raisons de faire la gueule. Sa voiture démarre une fois sur deux, son copain, échaudé par son mauvais caractère, est parti et elle doit terminer son internat dans le service de « médecine de la femme » du professeur Franz Karma. Pour la brillante étudiante passionnée de chirurgie, écouter les « bonnes femmes » et leurs histoires de règles douloureuses est un calvaire… Celle qui croyait tout savoir découvre aux côtés du docteur Karma une approche non orthodoxe de la médecine de la femme, qui propose des gestes médicaux moins invasifs et respecte les choix des patientes.

Aude Mermilliod, qui livrait en 2019 un témoignage militant sur l’IVG (Il fallait que je vous le dise), adapte avec beaucoup de liberté le roman de Martin Winckler, Le Chœur des femmes. Le scénario, brillamment construit, propose un portrait de groupe attentif des femmes qui défilent dans le service sans jamais lâcher Jean, dont le destin se mêle bien plus qu’elle ne l’attend à ce chœur féminin. Le trait est d’une grande douceur, mais suffisamment réaliste, voire pédagogique, pour évoquer des questions d’anatomie (un petit Guide illustré de la santé intime des femmes est offert avec l’album), la couleur souligne sans trop en faire les humeurs de chacun.

Il fallait bien toute cette délicatesse et cette finesse d’approche pour traiter cette histoire magnifique : un drame antique, porté par le souffle de conteuse d’une auteure qui ne se défile pas face à des émotions puissantes et double son récit d’une réflexion militante très documentée sur le rapport de la médecine gynécologique aux femmes. La bienveillance, la défense de l’intérêt des femmes dans ce qu’elles ont de plus spécifique, le profond respect de toutes les individualités rendent l’album absolument lumineux.